Albert Besnard
(Paris 1849-1934)
Aux Aguets
Planche 12 de la série Elle
1900
Eau-forte sur van Galder, d’un tirage à 9 épreuves.
140 x 110 mm, marges 450 x 305 mn.
Signée en bas à droite au crayon A. Besnard
Fils d’un peintre d’Histoire issu de la génération Ingresque, Albert Besnard se forme aux Beaux-Arts de Paris au sein de l’atelier d’Alexandre Cabanel, puis de Sébastien Cornu. Il remporte, à vingt-cinq ans, le Prix de Rome avec La Mort de Timophane, tyran de Corinthe. Durant son séjour romain, Besnard se marie, découvre et s’éprend de la puissance lumineuse méridionale. C’est après un bref séjour à Londres où il expose à la Royal Academy que l’artiste entreprend un voyage de neuf mois en Inde. Il y découvre la richesse et l’opulence chromatique orientale qui irrigueront la plupart de ses pastels et de ses portraits bourgeois. Tout autre se révèle être l’atmosphère sombre et tragique qui se dégage de son œuvre gravée. Artiste à la personnalité profonde, Besnard ne refuse pas à son art l’expression de ses angoisses intérieures. C’est à travers une œuvre gravée dense, composée de deux cents eaux-fortes s’organisant en suite, qu’il parvient à traduire une vision très symbolique et noire de l’existence humaine. L’une des plus importantes lui est commandée en 1900 par le collectionneur Joseph Vitta (1860-1942) sous le titre d’Elle, sous entendu La Mort. Le thème thanatologique touche, au fil de vingt-six scènes allégoriques, les tourments intérieurs du quotidien liés à l’Amour. Passionnée, charitable ou érotique, la mort (ici symbolisée par la figure du squelette) agit en tant que miroir révélateur de l’absence ou la présence de ses formes d’amour et de ses conséquences douloureuses. Besnard parvient à illustrer, de façon poétique les noirceurs de l’âme que sont l’envie, la peur, l’abandon, le désespoir et la destruction. Notre planche, douzième de la suite, exprime bien toute les inquiétudes et la peur qu’entraînent la passion amoureuse.
Dans un champ fleuri, la mort encapée menace de sa faux deux jeunes amants dont les corps se confondent et s’unissent sous la puissance de leur étreinte. Image splendide aux contrastes graphiques puissants qui opposent et allient à la fois lumière et noirceur, douceur et dureté, amour et mort, monde terrestre et céleste. Cette gravure nous révèle toute la tragédie, certes fatale, mais ici magnifiée, des antagonismes existentiels.
700 €
Bibliographie & Références :
Sylvie Carlier, Le symbolisme & Rhône-Alpes – De Puvis de Chavannes à Fantin-Latour 1880-1920, entre ombre et lumière, 2010, Musée Paul Dini
Coll. Christine Gouzi, Stéphanie Cantaturri, Chantal Beauvalot, William Saadé. Albert Besnard (1849-1934) Modernités Belle Epoque, Catalogue d’exposition du Petit-Palais, Somogy éditions d’art, 2016, 304 p.