D’après Alfons Mucha

(Ivancice 1860 – Prague 1939)

Bruyère de Falaise

Vers 1930

Huile sur bois d’acajou
33 cm x 66 cm

Signé en bas à gauche J. Ollat, inscription pyrogravée au dos Mucha La Topaze

C’est à l’automne 1887 que le floral Mucha, alors âgé de vingt-sept printemps, décide de parfaire son miel artistique aux côtés du groupe des Nabis, au sein de la capitale française. Disciples de Paul Gauguin, qu’ils considèrent comme nouveau Messie de l’art, les Nabis, sont avant tout de jeunes peintres symbolistes passionnés d’ésotérisme et de spiritualité. Ce gang des cinq, formé en 1888 à l’Académie Julian à Paris, se compose de Maurice Denis, Paul Séruriser, Pierre Bonnard, Paul-Élie Ranson et Edouard Vuillard. Ils se baptisent les Nabis (Les Prophètes en Hébreu), terme illustrant bien leur quête de spiritualité et de renouveau esthétique prônant un retour à l’imaginaire et à la subjectivité. 

Mucha s’inscrit donc à l’Académie Julian et s’intègre rapidement au groupe des artistes slaves de Paris. C’est grâce à l’un deux, polonais, Wladislaw Slewinski qu’il fait la rencontre de Gauguin en 1891, avant son départ pour Tahiti. « Il sait raconter splendidement la mer. » L’artiste tchèque est très impressionné par le charisme et la verve avec laquelle Gauguin transmet sa vision passionnée et singulière de l’art : « Il savait parler de l’art avec une grande clarté. Il nous a expliqué sa relation à la nature. Il a aussi amené quelques-unes de ses peintures et dessins, toutes extraordinaires, et par l’exécution et par les couleurs. » 

Mucha, dès lors introduit dans ce cénacle bohème et folklorique, fait la rencontre de la très scintillante Sarah Bernhardt. L’alchimie opère immédiatement : l’affiche qu’il réalise pour la promotion de son spectacle Gismonda connaît un véritable succès. Alors à l’apogée de sa gloire, la muse créatrice se révèle en effet très attentive à son image artistique. Divinement représentée sur un fond argenté aux douces tonalités pastel, la tragédienne est conquise par la sensualité et la modernité dont Alfons Mucha la drape. 

Devenus complices d’art et d’âme, Sarah accueille en 1902 Alfons aux côtés du peintre symboliste Georges Clairin, les invitant à séjourner dans sa fantastique résidence militaire située à Belle-Ile-en-Mer. Mucha, porté par la magie des lieux, réalise une petite aquarelle  représentant une Jeune Bretonne au  bord de la mer, qui lui servira de support pour la réalisation du panneau décoratif Bruyère de Falaise. Si la Bretagne bénéficie en cette fin de siècle d’une aura féérique très puissante, liée à la diffusion de nombreuses épopées médiévales où la rêverie celtomane se mêle aux préludes romantiques nationaux, Alfons Mucha demeure l’un des artistes s’étant le plus intéressé à l’étude des dentelles et ornements finistériens.

Ill. Alfons Mucha, Jeune Bretonne au bord de la mer, vers 1900, aquarelle sur papier, 16 x 32 cm, Mucha Trust. 

Notre huile sur bois, peinte dans le sillage de Mucha, réinterprète le panneau décoratif aux Bruyères. L’on y retrouve en effet la même jeune femme de profil aux yeux clos revêtue de la coiffe blanche et du costume noir traditionnel breton. Le bouquet de bruyères pourpres est ici remplacé par un bouquet d’algues. Cette gracieuse icône bretonne aux traits affirmés se détache d’un paysage à la touche impressionniste et fougueuse, aux reflets moirés de notes rosées, bleutées et argentées sur lequel voguent voilier et navire. L’atmosphère tumultueuse des embruns marins confèrent à l’œuvre une dimension plus mélancolique, profonde et tourmentée que l’affiche originale.

Ill.  Panneau décoratif : Bruyère de Falaise, 1902. Lithographie, 75 x 36 cm. Galerie GOAP, Prague.

Prix sur demande

Bibliographie & Références :

Artistes Tchèques en Bretagne; de l’Art Nouveau au Surréalisme, catalogue d’exposition réalisé sous la direction de Philippe Le Stum, Anna Pradovà et Kristyna Hochmuth. Editions Locus Solus, 2018, 127.p.