Paul-Albert BAUDOUIN
(Rouen, 1844 – Paris, 1931)
La Symphonie
Panneau préparatoire pour l’ensemble décoratif du théâtre de Rouen
circa 1882
huile sur toile
128 x 103 cm
Admis à l’École des Beaux-Arts de Paris en 1874, Paul Baudouin étudie dans l’atelier de Pierre Puvis de Chavannes, et se forme également auprès de Charles Gleyre et de Jules-Élie Delaunay. Connu pour ses peintures décoratives de style symboliste souvent inspirées de l’Antiquité, avec des représentations de personnages allégoriques dans des paysages, Baudouin excella dans la technique de la fresque et fonda un atelier destiné à l’enseignement de cette dernière. Il réalise notamment les vastes fresques de la Maison Hannon, chef-d’œuvre de l’Art Nouveau à Bruxelles. L’artiste reçoit également une médaille d’or à l’Exposition Universelle de Paris de 1889 pour L’Abreuvoir et Les Blanchisseuses. Il réalise aussi les fresques de la voûte du péristyle entourant le jardin du Petit Palais de Paris, composées de trois grandes sections scandées par les figures féminines des Saisons et rythmées par des médaillons où figurent les mois alternant avec les heures du jour et de la nuit.
Baudoin réalise aussi des commandes pour d’autres bâtiments publics en région parisienne (Mairie de Saint-Maur-des-Fossés), toujours conservées de nos jours. Notre tableau est quant à lui préparatoire à la décoration du théâtre de Rouen, faisant partie des huit grands panneaux esquissés pour ce projet autour des thèmes suivants : Orphée, La Mélodie, La Symphonie, La Musique Héroïque, La Musique Dramatique, La Danse, Le Chant, La Pastorale. L’ensemble, désormais perdu est détruit dans l’incendie du 28 juin 1887. La facture brossée visible sur le rocher et en partie basse de notre tableau est typique du faire de l’artiste, réalisée à l’aide d’un pinceau sec et du manche de son pinceau. Baudoin réalisait en effet de grandes esquisses peintes sur toile à la manière d’un dessin avant d’exécuter ses compositions à la fresque. L’usage de la peinture à l’huile témoigne en effet de la volonté du peintre de se placer dans les conditions de réalisation de l’oeuvre finale. L’artiste choisit cette technique afin d’obtenir les mêmes effets de matière et de brillance que sur les peintures murales finales, également réalisées à l’huile. La touche de l’artiste, les empâtements et les stries de poils durs du pinceau sont très visibles sur toutes ses esquisses comme sur ses réalisations finales. L’échelle de ces traces peut varier. Paul Baudouin utilisait des brosses allant de quatre centimètres de large environ pour réaliser ses peintures murales, à quatre millimètres pour ses esquisses, mais l’on retrouve toujours le rapport de dix entre les deux. Sur notre Symphonie, la peinture est plus ou moins épaisse selon les endroits, les empâtements sont irréguliers et la couche picturale est opaque ; Les couleurs sont obtenues par mélange avant d’être appliquées sur la toile (sans glacis).
Paul Albert Baudouin, Fresques Art Nouveau, escalier de la Maison Hannon, Bruxelles.
Réalisées par Paul-Albert Baudouin entre 1909 et 1910, les trois grandes sections de la voûte du Péristyle du Musée du Petit Palais de Paris ont très récemment fait l’objet d’une importante campagne de restauration.
Notre tableau met en scène trois allégories féminines de la Symphonie, jouant chacune de la musique dans un décor champêtre. Nues, ces trois femmes sont peintes avec un réalisme académique, typique du Second Empire et de la IIIème République. À gauche, une femme aux longs cheveux bruns est assise sur un rocher, jouant d’une lyre. Au centre, la figure principale est debout, les cheveux relevés jouant d’une flûte. À droite, une troisième femme est assise, jouant du luth. En haut à droite, l’on aperçoit le buste sculpté d’un homme barbu, représentant Pan, dieu antique fortement lié à la musique et célèbre inventeur de la flûte éponyme : un instrument à vent composé de roseaux de différentes longueurs, joué par l’une des muses. En haut à gauche, une quatrième figure féminine estompée et quasi transparente est en mouvement, semblant danser ou brandir un objet au-dessus de sa tête. Cette scène se déroule dans un lieu sauvage, encadrée de grands rochers et d’arbres à la frondaison foncée, plantés dans un paysage montagneux aux teintes bleutées. L’ensemble évoque l’idée d’une Arcadie idéalisée, d’un lieu d’harmonie entre l’humain et la nature. Ode à la musique et à la beauté féminine, ce beau panneau aux traits picturaux volontairement esquissés est bien préparatoire à la fresque d’un ensemble décoratif symbolisant l’harmonie des arts.
VENDU
Bibliographie :
Thieme-Becker, Tome III, 1909, p.60, Baudouin, Paul Albert.
I.VAISSE, Le décor peint des salles de spectacles, Revue des Monuments historiques 4/1978, p.66 – 70
“Paul Baudouin, professeur du cour de fresque à l’école des Beaux-Arts, La Fresque, sa technique et ses applications”. Éditions Albert Lévy, 2, rue de l’Échelle, Paris, M CM XXXI.
Agnès Gaudu-Majstorovic, Esquisse de Paul Baudoüin, support / tracé n°12, 2012, p. 103- 109.